Les années 70 (titre non définitif)
L'ère révolutionnaire, qui prévaut à la fin des années 60, reste d'actualité lorsque s'ouvre la décennie à venir. Les chanteurs deviennent parfois des portes drapeaux.
Les mots pour le chanter
L'engagement de Charles Aznavour se confirme au début de la décennie. En 1970, dans « Le temps des loups » il dénonce la violence. Son interprétation de « Comme ils disent » résonne comme un pamphlet contre l'homophobie. Après un passage par Broadway et l'Olympia, il est récompensé par le Lion d'Or au Festival de Venise pour la version italienne de la chanson du film « Mourir d'aimer ».
En 1975, il marque le soixantième anniversaire du génocide arménien, avec « Ils sont tombés ». Sa popularité aux Etats-Unis lui vaut de voir quelques-uns de ses titres repris par les plus grands. Ainsi, Ray Charles chante « La Mamma » et Fred Astaire « Les plaisirs démodés » en 1976. Un an plus tard, c'est Bing Crosby qui interprète « Hier encore ».
Gilbert Bécaud marque aussi la décennie de sa cravate à pois. L'interprète, qui multiplie ses apparitions sur scène, enregistre moins. Pour autant, « La solitude ça n'existe pas » de Pierre Delanöe et « L'indifférence » co-signée par Maurice Vidalin constituent quelques-uns des grands moments de sa carrière.
Pour Michel Sardou, 1970 s'ouvre sur une tournée avec Alain Barrière et une première partie lors de l'Olympia d'Enrico Macias. L'année suivante, alors que « J'habite en France » est saluée par Georges Pompidou lui-même, le chanteur passe en vedette à l'Olympia. Après les succès de « La maladie d'amour » ou encore de « Bonsoir Clara », Michel Sardou se forge l'image d'un chanteur polémiste. Il déclenche les foudres des féministes avec « Les vieux mariés » et « Les villes de solitude ». Les opposants à la peine de mort s'indignent, eux, du titre « Je suis pour... » Dès lors, les tournées de Michel Sardou sont émaillées d'affrontements si bien que le chanteur est contraint d'annuler deux dates en 1976. Une expérience au goût amer pour Michel Sardou qui préfère se tourner vers des textes plus rassembleurs, comme « En chantant », où il évoque son enfance ou bien « Je vole » qui témoigne de son départ de sa famille.
Romantisme et nostalgie
Les années 70 voient également débarquer un jeune éphèbe israélien, Mike Brant, qui, après avoir été distingué avec « Mais dans la lumière », s'impose avec « Laisse-moi t'aimer ». Séduite, Dalida lui propose de participer à son spectacle à l'Olympia en 1971. Il se produit aux côtés de l'icône durant plus de deux semaines. Les succès s'enchaînent, « Qui saura », « Rien qu'une larme », « Tout donné, tout repris », « Viens ce soir », « C'est comme ça que je t'aime » ou encore « Qui pourra te dire ? ». Chanteur de charme, Mike Brant semble aussi solitaire que dépressif et fait une première tentative de suicide en 1974.
Après avoir traversé les " Champs Elysées " en 1970, Joe Dassin s'offre « L'Amérique ». Cinq ans plus tard, « L'été indien » est en tête des hits parades, un titre écrit par Claude Lemesle et Pierre Delanöe, adapté de la chanson de Toto Cutugno. En 1977, « A toi » est un nouveau succès qu'il interprète lors de son ultime passage à l'Olympia en 1979.
En 1978, après avoir été le choriste de Patrick Juvet, « Le chanteur », Daniel Balavoine, connaît son premier succès. L'année suivante, il se produit au Palais des Congrès, où il interprète Johnny Rockfort, le « loubard » en quête d'identité de Starmania, l'opéra rock de Luc Plamandon et Michel Berger. A ses côtés, France Gall ou encore Diane Dufresne.
Outre le succès naissant des comédies musicales, les formations sont également particulièrement appréciées en cette décennie. En 1972, ce sont les débuts du Big Bazar avec à sa tête Michel Fugain entouré de 10 musiciens, chanteurs et danseurs. « Une belle histoire » qui augure d'un « Printemps » où « Tout va changer ». « La fête » se poursuit jusqu'en 1976, époque à laquelle le groupe ne semble plus en phase avec son temps.
La mode des duos est aussi le fait de Stone et Charden qui tentent « L'aventura », « Made in Normandie » tandis que Ringo et Sheila laissent « Les gondoles à Venise ».
Une télévision ludique et réformée
La réforme audiovisuelle, présentée par Jacques Chirac alors premier ministre, permet aux programmes de se diversifier et de devenir parfois ludiques.
En 1972, le compte est bon pour Armand Jammot. Son jeu, « Des chiffres et des lettres » succède au « Mot le plus long ». L'émission, successivement présentée par Christine Fabréga, Patrice Laffont, Max Meynier, Laurent Cabrol et Laurent Romejko, détient aujourd'hui encore le record de longévité.
« Les jeux de 20 heures », créés par Jacques Solness quatre ans plus tard, deviennent également incontournables, jusqu'à leur disparition en 1987. Artistes et anonymes répondent à des questions de culture générale sous la houlette de Jean-Pierre Descombes et de « Maître Capello ». L'émission est diffusée sur la 3ème chaîne, qui est lancée en 1972. Elle n'est alors reçue que par un quart de la population. Trois ans plus tard, elle devient FR3 après le démantèlement de l'ORTF.
Les chaînes de l'Office de la Radiodiffusion Télévision Française sont désormais réorganisées en sept sociétés autonomes, qui restent sous le contrôle du premier ministre. Une émancipation toute relative qui permet notamment l'arrivée du premier manga, « Goldorak » un robot géant piloté par Actarus pour bouter hors de la terre l'empire galactique... tout un programme...
Le 7éme art tourne au scandale
Au cinéma, le vent contestataire qui règne depuis le milieu des années 60 n'en finit pas de souffler tandis que les sagas s'attaquent au côté obscur...
L'affront devant le tout Hollywood... Marlon Brando refuse l'Oscar du meilleur acteur qui lui est décerné pour le " Parrain " de Francis Ford Coppola en 1973. C'est une jeune indienne Apache qui s'exprime en son nom lors de la cérémonie pour dénoncer le traitement réservé aux Indiens sur grands et petits écrans et sensibiliser sur le sort des Sioux dans le Dakota du Sud.
Dans le même temps lors du festival de Cannes sur la Croisette, Marco Ferreri choque avec « La grande Bouffe ». Le film, qui réunit Michel Piccoli, Philippe Noiret, Marcello Mastroianni et Ugo Tognazzi pour un banquet mortel, ridiculise la tradition culinaire française. Pour autant, le long métrage reçoit le prix de la Critique Internationale ex-aequo avec « La maman et la putain » de Jean Eustache, qui ne manque pas non plus de provoquer un certain courroux.
En 1976, Jean Gabin déclare « ouverte la [première] cérémonie de remise des César du cinéma français ». C'est Georges Cravenne qui a l'idée de cette cérémonie à l'instar des Oscars. Romy Schneider est couronnée meilleure actrice pour « L'important c'est d'aimer » d'Andrzej Zulawski et Robert Enrico est récompensé pour « Le vieux fusil ».
Dark Vador montre son côté obscur et Luke Skywalker joue de son sabre dans « La guerre des étoiles » qui révolutionne les effets spéciaux en 1977. La fiction de George Lucas, suivie de 5 autres épisodes, sera sacrée à 6 reprises aux Oscars.
L'année suivante, c'est une autre saga qui débute, celle des « Bronzés », adaptée de la pièce écrite par le Splendid « Amour, coquillages et crustacés ». Les aventures de Popeye, Gigi, Bernard et Jérôme sont un succès ; si bien qu'un an plus tard les « Bronzés font du ski » et que 27 ans après « Les Bronzés [sont toujours] amis pour la vie ».
La décennie des lumières
Les avancées technologiques et scientifiques vont également largement marquer la décennie. Des progrès qui sont également source d'inquiétude. Ainsi, le 13 avril 1970, les 3 astronautes de la mission spatiale lunaire Apollo 13 lancent le SOS devenu célèbre « Houston nous avons un problème ». Suite à l'explosion d'un réservoir d'oxygène, James Lovell, John Swigert et Fred Haise sont contraints de revenir prématurément. Leur amerrissage est rendu possible quatre jours plus tard grâce aux équipes basées à Houston.
L'hôpital d'Oldham en Grande-Bretagne est, lui, heureux d'annoncer le 25 juillet 1978 la naissance de Louise Brown, le premier bébé éprouvette. Une fécondation in vitro réalisée par le docteur Robert Edwards. En France, quatre ans plus tard, c'est Amandine qui vient au monde.
1979 voit l'arrivée du walkman..., Johnny, Cloclo, Elvis ou encore les Beatles s'écoutent désormais partout sans déranger personne grâce à la compacité de la cassette audio et au casque.
Cette année là également, la fusée Ariane est lancée pour la première fois depuis le centre spatial guyanais de Kourou. Les Européens sont désormais engagés aux côtés des Américains et des Russes dans la guerre des étoiles.
Si la politique m'était contée
Sept ans plus tôt, les Américains ont déjà les yeux rivés vers le ciel pour apercevoir les hauteurs du Watergate. L'immeuble, qui abrite le siège du parti démocrate, est « visité » par cinq espions. Les individus sont surpris par la police. Après enquête des journalistes Bob Woodward et Carl Bernstein, il s'avère qu'ils ont agi pour le compte de Richard Nixon, alors en pleine campagne électorale. Réélu, le président américain, nie d'abord les faits avant de se rétracter suite à une enquête diligentée par le Sénat. La procédure « d'impeachment » est lancée ; Richard Nixon démissionne en 1974.
La même année en France, après la mort de Georges Pompidou, Valery Giscard d'Estaing arrive au pouvoir. Il devance d'un peu plus de 1% des voix le candidat socialiste, François Mitterrand, qui durant l'entre-deux tours est apostrophé par son rival qui lui lance cette phrase désormais célèbre « vous n'avez pas le monopole du cœur »...
« Le caudillo est mort, vive le roi ». Un vent de démocratie souffle sur l'Espagne en 1975 ; le général Francisco Franco Bahamonde disparaît après 36 ans de dictature. Le prince Juan Carlos de Bourbon lui succède.
Retour dans l'hexagone, où deux ans plus tard, Jacques Chirac est élu maire de Paris, au suffrage universel. Il sera également plébiscité en 1983 et 1989.
En 1977, Hamida Djandoubi est le dernier criminel exécuté en France. Il est décapité à la prison des Baumettes de Marseille pour meurtre après tortures et viol. La peine de mort est abolie quatre ans plus tard.
Le spectacle continue... et pourtant
Les années 70 voient la disparition d'artistes aussi emblématiques que charismatiques.
Le livre de la vie se referme d'abord sur Jimi Hendrix le 18 septembre 1970. Le guitariste et interprète de légende, figure de proue de la lutte contre la guerre du Vietnam, meurt étouffé suite à une intoxication par somnifères, selon la version officielle. Son interprétation de l'hymne américain lors du festival de Woodstock en août 1969 reste gravé dans les mémoires.
Le 4 octobre de la même année, c'est Janis Joplin qui disparaît à l'âge de 27 ans, victime d'une overdose. Symbole de la culture hippie, la chanteuse américaine laisse derrière elle, un album culte dans l'histoire du rock « Cheap trills ».
Les portes se referment également sur le chanteur des Doors. Jim Morrison, qui n'a que 28 ans, meurt le 3 juillet 1971 à Paris. Avec son groupe, formé en 1965, ce Rimbaud des temps modernes aura connu de nombreux succès : « Light my fire » ou « Riders on the storm ».
Les fans ne versent pas « Rien qu'une larme » à l'annonce du suicide de Mike Brant, le 25 avril 1975. « Qui saura » ce qui a guidé son geste a tout juste 28 ans.
« Le téléphone pleure » également le 11 mars 1978... Claude François disparaît tragiquement... les Clodettes sont orphelines et la France en deuil.
Le 9 octobre 1978, Jacques Brel, « L'homme de la Mancha », achève « La quête » et s'éteint des suites d'un cancer. Inoubliable interprète de « Ne me quitte pas » ou encore de « Quand on a que l'amour », le Belge repose sur l'une des îles les plus connues des îles Marquises, à Hiva-Oa près du peintre impressionniste, Paul Gauguin.
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